Sur Unlimited Tracker, les internautes pouvaient trouver des fichiers de musiques ou de films librement. Mais illégalement. Un informaticien de 29 ans, domicilié à Melun, a comparu, ce jeudi 28 juillet, devant le tribunal correctionnel de Melun pour des faits présumés de contrefaçons, de gestion et d’administration d’un site Internet avec diffusion d’œuvres protégées, de travail dissimulé ou encore détention d’une fausse carte d’identité et recel d’un ordinateur d’origine frauduleuse.
Enquêteur de la Sacem
En substance, il est mis en cause après la création, en 2009, du site Unlimited Tracker – fermé depuis 2014 – une plateforme qui indexait des liens de téléchargement pour du contenu illégal. Près de 180 000 membres ont d’ailleurs été recensés sur le site, hébergé en Lituanie. À l’origine, c’est un enquêteur de la Sacem (société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique) qui a découvert le pot aux roses. Il dépose plainte à la gendarmerie de Mormant.
Les investigations de la gendarmerie débutent par le compte PayPal du mis en cause, lui-même hébergé à Hong-Kong. Le site paraît d’ailleurs rentable puisque des bannières publicitaires étaient en ligne sur le site et les internautes pouvaient par ailleurs faire des dons pour garantir le bon fonctionnement de la plateforme. « Pourquoi avoir hébergé le site en Lituanie si ce n’est pour garantir l’anonymat ? », a questionné la présidente du tribunal. Et l’informaticien de rétorquer : « Un choix purement technique car ces logiciels sont mal perçus en France. »
Précautions
Selon les investigations, il aurait perçu quelque 1 200 € par mois de cette activité de 2009 à 2012 puis 400 € par mois de 2012 à 2014. « Vous vous êtes assurés de de certaines précautions mais saviez-vous que c’était illégal ? » a poursuivi la présidente ? « Non », a rétorqué le créateur du site, « j’ai seulement créé le site, je n’étais pas responsable du contenu. » Lors de la perquisition réalisée au domicile de ses parents, à La Chapelle-Gauthier, les enquêteurs saisissent du matériel informatique, une fausse carte d’identité et un ordinateur non-référencé par le constructeur.
« Vous êtes peut-être très bon en informatique mais vous avez un sens moral au ras des pâquerettes », a estimé la juge. Grâce à l’argent récolté via le site, il aurait réalisé des travaux dans sa maison, mais également voyagé à travers le monde. « Je vivais chez mes parents et je n’avais rien à payer : je n’ai jamais touché 1 400 € par mois grâce à ce site », a-t-il insisté. Et d’ajouter : « Si j’avais été prévenu de la nature illégale je l’aurai fermé immédiatement. »
Milieu en danger
« Les artistes sont les premières victimes de ces agissements qui empirent au fil des ans », a souligné Me Diringer, l’avocat de la Sacem. « C’est une vraie dévalorisation de la musique et il a eu un rôle actif dans cette entreprise illégale », a-t-il poursuivi, demandant près de 30 000 € de dommages et intérêts. Même constat pour Me Boespflug, le conseil de société civile des producteurs phonographiques qui a estimé ” que tout l’équilibre de ce milieu est en danger à cause du piratage”, demandant quelque 50 000 € de dommages.
Dans ses réquisitions, la procureure a dénoncé « une véritable industrie », créée par le prévenu et a demandé huit mois de prison avec sursis et 1000 € d’amende. L’informaticien, lui, estime avoir été « trop négligent » mais regrette aussi de ne jamais avoir été contacté pour qu’on lui indique le caractère illégal du site. Le délibéré sera rendu le 29 août.
Source : LaRépublique